« Echec et mat ! » : au jeu des échecs, c’est une phrase terrible ! Cette expression vient du persan : « shah mat ». Cela signifie que « le roi est vaincu, paralysé, impuissant ». Et quand le roi est vaincu, son armée a perdu le combat ; même si elle est intacte.
La vie est un jeu d’échecs ; l’histoire du monde est un jeu d’échec, où les hommes font des stratégies pour éliminer les forces de leurs adversaires et des épreuves. Et on entend partout (et ce n’est pas seulement en période électorale…) : « Echec et mat », parce qu’on se croit supérieur, maître de tout et qu’on fait semblant d’être victorieux.
Mais c’est il y a 1980 ans que la partie a été la plus acharnée, la plus extrême dans sa stratégie, mais aussi la plus éclatante dans sa victoire : Pâque, où Christ est mort et ressuscité ! Mais impossible de ne pas revenir à ce moment où Dieu était, semble-t-il, mis en échec et où Satan a pu penser : « Echec et mat », « le Roi est vaincu ! ».
1) L’échec et mat de Satan sur Dieu :
Tout concordait pour qu’enfin Satan, ce joueur le plus habile pour « les échecs », remporte la victoire. Il faut dire qu’il se considérait comme le champion toutes catégories depuis sa victoire sur les 2 premiers êtres humains ; et ses victoires avaient par la suite anéanti les plans successifs de Dieu pour relever l’humanité.
Dieu avait envoyé ses prophètes (Satan les qualifiait de « pions ») mais Satan avait réussi à les éliminer au fur et à mesure ; et cela grâce au camp-même que Dieu avait choisi : ses propres pions, le peuple d’Israël, avaient saboté la stratégie de Dieu. A travers la parabole des vignerons (Matthieu 21v33-46), Jésus montre le dernier atout de Dieu : « Enfin, le vigneron envoya son fils, en disant : ‘Pour mon fils, au moins, ils auront du respect !’ » (v37).
Face à ce dernier atout, Satan fait tout alors pour le faire tomber ; pour cela, il attend qu’il soit isolé. La solitude, l’isolement, voilà le meilleur moment pour la tentation… ! Satan va monter une stratégie « diabolique » pour faire tomber le Roi et le vaincre.
Dans le désert, au début de son ministère, l’occasion était favorable (Matthieu 4) ; Jésus se retrouve seul. Mais il n’est pas tombé, il a résisté à la tentation subtile du diable. L’occasion à nouveau favorable pour Satan est à Gethsémané : là aussi, le Roi est seul ; ses pions dorment et ne l’entourent plus, le fou est parti dans le camp ennemi. La partie est en train de se jouer à ce moment-là.
D’autant plus que la stratégie de Dieu est contrée par celle de ceux qui devaient l’entourer : Pierre veut défendre son Roi par les armes. Mais Jésus lui fait déposer son épée en disant que c’est la prière qui est la meilleure stratégie pour remporter la victoire.
Et même, il donne la solution pour tenir bon dans la solitude : « Veillez et priez ». C’est cette arme qui a permis à Jésus de remporter la victoire, là à Gethsémané.
Mais voilà que le Roi se retrouve de plus en plus isolé : les disciples, tous, prennent la fuite. Et les pions de Satan sont là, eux, et ils entourent Jésus. Satan prépare son « échec et mat » : grâce à l’abandon des équipiers du Roi, grâce à la trahison de l’un d’entre eux, grâce à l’aveuglement des autres (les chefs du peuple, les religieux).
Oh… le Roi n’est pas encore totalement vaincu, mais il est condamné par tous. Toutes les issues de secours sont bloquées. Pour cela on enfreint le règlement, la justice : on commet alors l’injustice la plus atroce. L’accusation qui va amener à déclarer « échec et mat » se fait sur la plus grande vérité : Jésus est Dieu.
Et l’adversaire, le diable, peut jubiler : le Roi est en train de perdre la partie, partie entamée depuis la chute des premiers pions.
2) Au-delà de la réalité visible, la victoire du Roi des rois.
– Bien sûr, tout ne s’est pas passé comme l’ennemi l’aurait voulu : pour rien au monde il aurait désiré que la mort du Roi coïncide avec le jour de l’anniversaire de la délivrance de l’Egypte (qui avait déjà été un échec retentissant pour lui) ; cette délivrance avait été possible pour ceux qui avaient sacrifié un agneau et qui alors avaient été épargnés de la mort.
Mais Dieu, selon son plan, avait fait dérouler les évènements pour que la mort du Roi, l’Agneau de Dieu, soit liée à ce rappel si grand et si important.
– Et surtout, en décidant la mort du Roi, Satan signait sa propre défaite ! Il n’avait pas compris que c’était lui qui allait connaître la défaite la plus cinglante. Il avait réussi à exposer le Roi aux premières lignes, à l’isoler ; il avait même réussi à le faire mourir, humilié sur une croix comme un criminel ; là le Roi avait été rejeté, méprisé, trahi.
Mais à la croix, « l’échec et mat » se retourne contre lui, lui le roi de ce monde. Jésus, le Roi des rois, abandonné par tous, par son Père même, là à la croix, Jésus « a désarmé toute autorité, tout pouvoir, les donnant publiquement en spectacle quand il les a traînés dans son cortège triomphal après sa victoire à la croix » (Colossiens 2v15).
Et cette victoire a été pleinement manifestée quand Christ est ressuscité ! Oui, elle atteste qu’il est vivant, que la mort n’a pas pu le retenir, et que c’est à lui qu’appartient la victoire ! La mort à la croix pouvait faire croire à la victoire de Satan mais la résurrection de Jésus a fait éclater pleinement celle de Dieu. La victoire de Dieu à la résurrection est intrinsèquement liée à celle de la croix.
Là, tout a été chamboulé : l’échec du Roi, le Fils de Dieu, a été transformé en victoire ; la victoire par la mort, la mort qui délivre. Grâce à sa mort, c’est la résurrection qui est assurée pour ceux qui se confieraient en lui, grâce à son pardon et à sa vie.
En fait, Dieu a su tirer parti de tous les coups de l’adversaire.
Dieu, le Maître de la vie, a ressuscité Jésus, et la partie a été définitivement gagnée. Parce que Jésus a accepté de mourir, de se perdre. Jésus avait dit à ses disciples : « L’heure est venue où le Fils de l’homme doit être glorifié. En vérité je vous le dis, si le grain de blé qui est tombé en terre ne meurt, il reste seul. Mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit » ; et il ajoute : « Maintenant a lieu le jugement de ce monde. Maintenant, le prince de ce monde sera jeté dehors » (Jean 12v24, 31).
Et Paul de s’écrier : « La victoire totale sur la mort a été remportée. O mort, qu’est devenue ta victoire ? O mort, où est ton dard ? » (1 Corinthiens 15v54-55). Et depuis la croix et la résurrection, Satan, le rusé, se sait perdu. « Echec et mat », cela a été contre lui.
Mais Dieu n’a pas encore décidé de le détruire. Satan sait qu’il est vaincu ; c’est un peu comme une condamnation qui a été signée mais qui prendra effet plus tard. Ce ne sera qu’au retour de Christ que cette victoire du Roi des rois sera pleinement manifestée.
En attendant, la chaîne de Satan est longue et il agit. Mais pour ceux qui se mettent au bénéfice de l’œuvre de Christ, c’est la vie et la victoire qu’il veut leur faire connaître ; dès maintenant.
3) Notre vie, une partie d’échecs ?
Notre existence pourrait aussi être comparée à une partie d’échecs. Tous nos actes correspondent au déplacement de nos pièces sur l’échiquier. Mais nous jouons sans trop calculer… Ou nous nous estimons suffisamment… doués ; nous préparons nos coups, mais nous perdons des pions. La partie est en train de basculer en faveur de l’adversaire.
Inévitablement ? Oui, parce qu’il y a en face un ennemi redoutable, qui nous fait croire que par nos propres moyens nous remporterons la partie, que la vie est un jeu que l’on gagne à la force du poignet, que l’adversaire n’est pas un ennemi mais un partenaire, que par ses pions, il nous donne des conseils pour réussir.
Mais dans cette partie qu’est la vie, « échec et mat », c’est la mort.
Il est facile de se laisser berner par notre ennemi, le diable, qui nous fait croire qu’on peut jouer n’importe quel coup, n’importe comment et que l’on va sortir vainqueur, malgré tout. Une des tentations les plus subtiles est de nous faire croire qu’on peut rester seul, qu’on est suffisamment intelligent et capable pour déceler les mauvais coups, que de prier (c’est-à-dire se confier en Dieu et non plus en soi-même) est un signe de faiblesse et de fuite.
Mais quand on est entouré des pions de l’adversaire, il y a de quoi désespérer et penser à l’issue fatale : on entend déjà le terrible « échec et mat »… On peut être accablé et sûr de la défaite ; l’ennemi s’acharne, comme à la croix, à dire : « Echec et mat ! ». Et comme nous sommes fragilisés parce que seuls dans ce combat, nous le croyons. Nous nous résignons face à l’évidence de l’échec de notre vie.
Quand les épreuves sont écrasantes, quand Dieu semble absent parce qu’on ne le voit pas intervenir, nous nous retrouvons dans la peau des disciples qui, après la mort de leur Maître, pensent qu’il n’y a plus rien à faire : « Echec et mat », la partie est perdue, il n’y a plus rien à espérer.
Mais cela est le contraire du message de la résurrection de Christ ! Parce qu’à Dieu, rien n’est impossible ! Il l’a prouvé : le tombeau était vide. Et Paul peut affirmer, parce qu’il l’a expérimenté : « Loué soit Dieu qui nous donne la victoire par notre Seigneur Jésus-Christ ! C’est pourquoi, mes chers frères, soyez fermes, ne vous laissez pas ébranler, travaillez sans relâche pour le Seigneur » (1 Corinthiens 15v57-58).
Pour vivre cela, j’ai choisi de le laisser diriger ma vie ; cela signifie qu’au lieu d’agir selon mes impulsions et mes capacités naturelles, je place ma confiance en lui, en recherchant sa volonté dans sa Parole. Je lui ai demandé un jour de me conduire, et depuis, je renouvelle cette demande, en lui disant mon incapacité à discerner les attaques, les stratégies du Malin, tout en sachant que j’ai une responsabilité : celle de « travailler sans relâche pour le Seigneur ».
« Echec et mat » : je sais que Dieu m’entoure « par devant, par derrière, sa main est moi », que je ne suis pas tout seul parce que Jésus-Christ, lui, a accepté d’être abandonné (parce qu’il prenait ma condamnation) ; je sais que Dieu m’assure de son alliance au lieu de la trahison que Jésus a subie ; je sais que Dieu me relève de mes chutes et de mes échecs, parce que Jésus a accepté d’être abaissé ; je sais qu’il me déclare juste parce qu’il a subi la pire des injustices, lui l’innocent ; je sais qu’il me libère du poids de mes fautes parce qu’il a pris sur lui mon péché ; je sais qu’il me donne la vie et la victoire parce que Jésus-Christ est mort et ressuscité.
C’est le secret de la victoire pour chacun. Avec la victoire de Pâques, Dieu nous rappelle que nous pouvons ne pas être fatalistes, découragés : cette victoire s’obtient par la foi et dans l’union avec Jésus-Christ, le ressuscité.
C’est pour cela que Paul s’écriait : « Nous sommes plus que vainqueurs par celui qui nous a aimés ».
Jean-Ruben