Dieu intervient-il… ? Il arrive qu’on puisse en douter quand les difficultés demeurent… Le peuple hébreu avait de quoi en douter : depuis des siècles, ils étaient esclaves des égyptiens ! Asaph pourtant, en résumé de l’action de Dieu, dit : « J’entends une voix qui dit : J’ai déchargé son épaule du fardeau et ses mains ont lâché la corbeille » ; cette voix qui parle de délivrance de ce fardeau qu’était les corbeilles remplies d’argile pour fabriquer les briques, ce fardeau accablant de l’esclavage… Oui, il est question de l’intervention libératrice de Dieu mais aussi de ce que les hébreux en ont fait. C’est-à-dire qu’il n’y a pas d’intervention transformatrice de Dieu sans lien avec l’attitude humaine. Comment Dieu agit-il ? Et qu’attend-il de nous ?
La réalité du fardeau.
« Les égyptiens réduisirent les enfants d’Israël à une dure servitude ; ils leur rendirent la vie amère par de rudes travaux en argile et en briques, et par tous les travaux des champs ; c’est avec cruauté qu’ils leur imposaient ces charges » (Exode 1v13-14) ; de plus, Pharaon, après que Moïse ait réclamé la libération des hébreux, avait accru leurs charges : « Vous ne donnerez plus comme auparavant de la paille pour faire les briques : qu’ils aillent eux-mêmes se ramasser de la paille ! »
La réalité des fardeaux écrasants est vraie pour nous aussi :
- Une personne me disait que, des dizaines d’années après, elle réagissait conditionnée par l’attitude rabaissante de sa mère ; l’éducation reçue peut être un fardeau qu’on traîne très longtemps. Le passé blessant peut être lourd à supporter et perturber tout le comportement.
- Le fardeau de l’avenir peut être lié au passé : je l’envisage avec un certain fatalisme ; par ex : mon père et mon grand-père ont mal vieilli, et j’appréhende déjà quand je commencerai à vieillir… Mon capital héréditaire est un fardeau qui m’écrase. Ma mère a réagi de telle manière, et comme je lui ressemble, il va m’arriver ce que je redoute.
- Ce qu’on m’inflige au travail ou à la maison peut rendre difficile et pesante une activité quelconque. Ce qui devient insupportable n’est souvent pas le travail en lui-même, mais les conditions imposées pour le vivre.
- Je ploie sous le poids des responsabilités que je considère comme un fardeau ; et tout devient pénible alors. Je peux chercher à démissionner en tant que parent, conjoint, au niveau de mon engagement dans l’Eglise ; ex : Moïse face aux murmures du peuple : Nombres 11v10-15.
- Le fardeau de l’épreuve est une réalité, quand on la subit. Observons par ex : Méphibosheth : alors que David l’invite à sa table en tant que fils de Jonathan, son ami, à cause de son handicap, il lui répond : « Qu’est donc ton serviteur pour que tu t’intéresses à lui ? Je ne vaux pas plus qu’un chien mort » (2 Sa 9v7-8). Et ce n’est pas toujours les conséquences d’un handicap qui sont les plus lourdes à supporter que le regard des autres.
- Le poids du péché commis est quelque fois tellement lourd qu’il empêche de vivre ; son simple souvenir conduit à ne plus se supporter ; ex : Judas a fini par se pendre ; ou David quand il ruminait ses fautes : « Mes os se consumaient, je gémissais à longueur de jour » (Psaumes 32).
- Les projets, même les plus heureux, peuvent devenir des fardeaux quand on se sent dépassé (il est facile d’envisager un beau mariage mais à cause des préparatifs et des soucis, perdre de vue le plaisir de le vivre…)
- Des situations inchangeables (certaines peuvent être même évolutives négativement) sont des fardeaux écrasants : le comportement de nos enfants quelques fois, un conjoint avec lequel il est difficile de vivre,…
Quelle réponse nous donne Dieu ? Face au fardeau des hébreux en Egypte, Dieu avait une solution. Si Dieu n’agit pas toujours de la même manière, nous pouvons connaître cette certitude affirmée dans le Psaume 81v7:
La réalité de la délivrance :
Mentionnons d’abord 2 risques :
- Celui qu’ont connu Saül et Israël face à Goliath : « Ils entendirent les paroles du Philistin et ils furent effrayés et saisis d’une grande crainte ». Face à nos Goliath, nous pouvons vivre la même réaction : « Il n’y a plus de place pour une délivrance possible » ; le fatalisme et le découragement prennent toute la place.
- « C’est par moi-même que j’obtiendrai la délivrance ; je vais m’en sortir seul » ; cela a été la tentation de Moïse : lire Ac 7v24-25.
La voix que je peux moi aussi entendre me dit autre chose. « Oui, j’ai déchargé son épaule du fardeau ».
Psaume 81v7
La notion de délivrance peut se résumer en un mot : la rédemption
C’est la délivrance de celui qui est en esclavage ou en prison pour une dette. Le Rédempteur est le nom qui qualifie Dieu : il est celui qui délivre de la prison :
- La prison de la mort : face à sa rencontre avec Dieu après sa mort, Job pouvait affirmer : « Je sais que mon Rédempteur est vivant ; je le verrai et il me sera favorable » (Job 19v25).
- La prison de la déportation : les babyloniens avaient écrasé Israël et l’avait déporté ; mais Dieu va intervenir : « Ainsi parle l’Eternel, votre Rédempteur, j’envoie l’ennemi contre Babylone » ; voir également 2 Chroniques 20v17. David (Psaumes 19) dit : « Préserve-moi des orgueilleux, Eternel, mon rocher et mon… libérateur » ; « Dieu est pour nous le Dieu des délivrances » (Psaumes 68).
- La prison du péché : au lieu du poids de la culpabilité à cause du passé, Dieu remet la dette qu’on a envers lui : il se présente comme étant le libérateur (Esaïe 54v4-10). « En Jésus-Christ, parce qu’il s’est offert en sacrifice, nous avons été délivrés et nous avons reçu le pardon de nos fautes » (Ephésiens 1v7). « En Christ, nous avons été délivrés, car nous avons reçu le pardon de nos péchés ».
Cette délivrance est rendue possible à cause de son amour
« Dans mon amour éternel, j’ai de la tendresse pour toi ; c’est là ce que déclare ton libérateur, l’Eternel » (Esaïe 54). Jésus dit : « L’Esprit du Seigneur est sur moi pour annoncer une bonne nouvelle aux pauvres, il m’a envoyé pour proclamer aux captifs la libération, pour apporter la délivrance aux opprimés et proclamer l’année de grâce accordée par le Seigneur » (Luc 4v18-19). « Tous ont péché [et ce fardeau est trop lourd] et sont privés de la présence glorieuse de Dieu ; ils sont gratuitement déclarés justes par sa grâce par le moyen de la délivrance qui est en Jésus-Christ » (Romains 2). « Vous avez été libérés de cette manière futile de vivre que vous ont transmise vos ancêtres ; il a fallu que le Christ, tel un agneau pur et sans défaut, verse son sang précieux en sacrifice pour vous » (1 Pierre 1v18-19).
Voilà l’œuvre de Dieu ; oui, « il a déchargé ses épaules, il a retiré son fardeau ». Cela est vrai, aujourd’hui ; même si Dieu agit de différentes manières.
Mais il y a une 3° réalité : la réalité de l’abandon
« Et ses mains ont lâché la corbeille ». Les versions traduisent ce texte de 2 manières :
- (1) « Ses mains sont libérées de la corvée des corbeilles » : avec cette traduction, le psalmiste redirait avec d’autres mots la délivrance de Dieu.
- (2) Ou il parle de la réponse des hébreux, après l’intervention divine ; en tout cas, la portée de cette 2° traduction possible touche concrètement notre vie personnelle. C’est cette seconde traduction que nous prendrons.
Mais nous pouvons vivre son contraire, malheureusement : Dieu nous libère mais… nous ne lâchons pas prise. Oui, il est possible, malgré ce que Dieu a fait pour nous, de nous accrocher à notre fardeau, de ne pas lâcher ce qui pourtant est lourd et même écrasant.
Voici quelques domaines :
- Je peux continuer à rester enfermé dans un poids héréditaire dont je ne réussis pas (ou peut-être ne veux pas) me libérer. Les disciples, au sujet d’un homme aveugle de naissance, pensent qu’il peut l’être à cause des péchés de ses parents (Jean 9). Mais Jésus veut le libérer de ce fardeau, qu’il soit héréditaire ou pas (pour Jésus, l’important n’est pas dans la cause mais dans le but) : « Va et lave-toi au réservoir de Siloé » ; « Il y alla, se lava et s’en retourna voyant clair ». Il a lâché ce fardeau dont le Seigneur voulait le délivrer en faisant la démarche d’obéissance et de confiance.
- Je peux continuer à vivre sous le poids de la culpabilité pour une faute dont j’ai pourtant demandé pardon précédemment à Dieu. Pourquoi… ? « C’est trop facile de profiter du pardon de Dieu, sans me faire du mal pour montrer combien je regrette » ; et quelque part, pour mériter le pardon. Mais quelle erreur et quel orgueil… Pourtant, ce n’est pas la pensée de Dieu exprimée à travers ce qu’a vécu David : « Je t’ai fait connaître mon péché ; et tu as effacé la peine de mon péché » (Psaumes 32). Effacé. Rien à ajouter.
- Je peux continuer à me faire du souci… même après l’avoir remis à Dieu. Mais apprendre à lâcher la corbeille est certainement un pas de foi nécessaire. Quelque part, si je ne le fais pas, c’est parce que d’un côté je m’engage devant Dieu et que d’un autre je me pense indispensable ; histoire de participer au même titre que le Seigneur…
Je me rappelle cette histoire de cet homme qui portait un ballot sur sa tête : il monte, invité par un missionnaire, dans sa voiture et qui, pour ne pas exagérer, continue à porter son bagage. Nous trouvons cet homme bien naïf,… jusqu’au moment où nous comprenons que nous faisons la même chose devant Dieu.
Le fait de vivre cette attitude, en restant accroché à la corbeille, provoque une pression supplémentaire qui empêche de rayonner et d’être épanoui. De ne pas vraiment lâcher cette corbeille qui me pèse provoque une fatigue morale (et physique ?).
Au contraire, lâcher la corbeille, c’est réagir comme Abraham qui obéit à Dieu pour lui offrir son fils en sacrifice, qui va jusqu’au bout et qui affirme précédemment à Isaac qui demande où est l’animal pour le sacrifice : « L’Eternel pourvoira ». Confiance, même si la logique refuse cette pensée.
Lâcher la corbeille
- C’est réagir comme Pierre qui est en prison à cause de son témoignage,… et qui dort ; malgré le risque de mourir le lendemain.
- C’est réagir comme Paul qui s’entend dire que l’épreuve physique, pour laquelle il prie depuis longtemps, va continuer en acceptant que c’est dans la faiblesse que la puissance de Dieu s’accomplit (2 Co 12).
- C’est donc accepter de ne pas arracher à Dieu ce qui semble être un dû, et même une démarche qui semble très spirituelle. C’est pour cela que le Psaume 81 commence par un appel à louer Dieu ; parce que tourner ses regards vers lui, c’est arrêter de se considérer égocentriquement ; c’est diminuer soi-même et laisser le Seigneur grandir en nous ; c’est vivre alors ce repos, cette paix qui découlent d’un abandon vrai à ce que le Seigneur fera.
Cela m’encourage de me rappeler les moments où j’ai « lâché la corbeille » que le Seigneur avait prise.
Dans quel domaine le Seigneur voudrait-il me délivrer ?
« Le Seigneur est proche. Ne vous inquiétez de rien, mais en toute chose, faites connaître vos besoins à Dieu par des prières et des supplications, avec des actions de grâce. Et la paix de Dieu, qui surpasse tout ce qu’on peut concevoir, gardera votre cœur et votre pensée sous la protection de Jésus-Christ »
Philippiens 4
Dans quel domaine est-ce que je m’accroche à mon fardeau, pourtant remis à Dieu ?
Jean-Ruben (Message prêché à Agen en Mars 2014)