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Jean 20v16 : « Marie de Magdala … »

La peur : Mais pourquoi donc Jésus dit si souvent « Ne craignez pas » ?Pâque est la fête de la joie ! Après la tristesse due à la mort de Jésus, c’est l’allégresse ! Or, ce qui transparaît comme réaction chez les disciples (même s’ils ont vu Jésus ressuscité !), c’est le contraire : les femmes qui étaient allées au tombeau « étaient saisies de frayeur et d’épouvante » (Matthieu 28) ; « La peur et le trouble les avaient saisies » (Marc 16) ; quand Jésus apparaît aux disciples enfermés dans la chambre haute, il commence en leur disant : « Ne craignez pas » ; ce n’est qu’après cela qu’ « ils furent remplis de joie en voyant le Seigneur » (Jean 20). Ce matin, nous allons nous arrêter sur la rencontre de Jésus (qui vient de ressusciter) avec Marie de Magdala : ce sur quoi Jean insiste, c’est sur ses pleurs.

Le risque, pour nous encore aujourd’hui, est de faire de Pâque une joie superficielle, qui ne répond pourtant pas à nos questions, sans devenir une espérance profonde qui nous transforme.

Pâque veut s’immiscer dans la réalité de nos épreuves, de nos peines et apporter une réponse vraie à nos aspirations.

1) Les pleurs de Marie de Magdala (Jean 20v11, 13, 15) :

– La raison de ses pleurs est précise : celui qui l’avait délivrée alors qu’elle était possédée par un démon, est mort. C’est pour elle la désillusion complète ; lui qui avait manifesté sa puissance sur le diable, n’avait pas pu échapper à la méchanceté humaine… C’est la désillusion d’autant plus que la pierre du tombeau a été poussée : qu’est-il arrivé d’anormal ?

Plus tard quand elle retournera au tombeau, son corps n’est plus là : quelqu’un l’a pris, et elle ne peut même pas rendre à Jésus un dernier hommage. Tout se dérobait sous elle.

. Alors, après sa première visite, elle est allée en parler aux disciples en disant que le tombeau était ouvert ; Pierre et Jean sont partis vers le sépulcre. Et ils ont constaté, ils ont compris et ils ont cru ! Tout s’éclaire, les paroles de Jésus, les textes de l’Ecriture ! Il est vraiment ressuscité !

Marie aussi y est retournée. Elle reste dehors ; elle se perd dans le trouble et les pleurs, incapable d’être sensible à la réaction de Pierre et de Jean et à la certitude de la résurrection de Jésus.

En entrant dans le sépulcre, elle voit 2 êtres dont elle ne comprend pas l’état surnaturel ; à leur question : « Pourquoi pleures-tu ? », elle répond selon ses pensées qui relèvent d’une fixation (qui est la source de ses pleurs) : « Le corps de mon Seigneur a été emporté ».

Elle ne sait pas voir au-delà de sa préoccupation. Et cela l’amène à rester sourde et aveugle à la réalité.

 

. Puis Jésus vient ; et il lui pose la même question que celle des anges : « Pourquoi pleures-tu ? », avec une piste supplémentaire : « Qui cherches-tu ? ». A travers cela, Jésus l’invite à dépasser ses pleurs pour réfléchir à son premier but qui était de trouver Jésus. Mais elle reste figée sur sa pensée : le corps de Jésus a été volé.

Elle ne peut même pas reconnaître la voix de son Maître. Ses pleurs continuent à noyer sa réceptivité pour lui permettre d’entendre autre chose.

Elle est tellement submergée par l’échec trop lourd pour elle qu’elle ne peut plus se rappeler ce qu’a été et fait Jésus : sa délivrance (alors qu’elle était liée par Satan), les miracles qu’il a accomplis, son enseignement (et en particulier sur sa mort et sa résurrection).

Comme pour les disciples du reste.

 

Elle ne réagit qu’en étant envahie par la peur et la désillusion. Cela l’a métamorphosée, mais dans le négatif. Ses réactions et ses réponses sont logiques et vraies ; mais elles ne lui apportent pas de vraie solution.

Sa douleur est compréhensible ; et Jésus ne lui fait pas de reproche.

 

– Quel dommage que nous nous arrêtions sur une vérité, sur une situation réelle mais qui nous empêche d’être réceptif à une autre vérité : celle de Dieu.  Nous ressemblons à Marie de Magdala : nous nous figeons sur notre logique, et nos idées deviennent fixes (et nous nous étonnons de ne pas avancer…) ; si bien que, même si « Dieu parle tantôt d’une manière, tantôt d’une autre, on n’y prend pas garde » (Job 33).

 

Comment en arrive-t-on à cette surdité spirituelle ? C’est peut-être la spirale de l’échec ou de la déception qui nous fait réagir par peur ; nous appréhendons le présent et l’avenir par rapport à un passé douloureux. Et nous ne voyons que négativement, incapables de dépasser cette idée fixe, d’entendre et de croire.

Nous avons vu pourtant Dieu agir dans le passé, nous lui appartenons ; mais notre regard est tourné ailleurs : vers nos échecs, notre raisonnement.

 

Quelques domaines : que ce soit pour notre vie de couple, pour l’éducation des enfants, notre vieillesse, notre vie professionnelle, notre vie de sanctification où nous sommes appelés à vivre selon Dieu, notre témoignage, notre vie d’Eglise, comment analysons-nous le présent, comment envisageons-nous l’avenir ?

Si c’est négativement, s’il n’y a plus ou peu d’espérance dans notre pensée (malgré la lecture de la Bible, et les paroles pleines de promesses), malgré les encouragements et les bénédictions, nous entrevoyons le présent et l’avenir à travers nos déceptions et nos échecs.

 

Quand Moïse, qui vient d’être envoyé par Dieu, rencontre les hébreux, qui étaient esclaves des égyptiens, pour leur dire que Dieu va les délivrer, leur réaction est surprenante : « L’angoisse et la dure servitude les empêchèrent d’écouter Moïse » (Ex 6). Quel dommage !

Mais Moïse réagit de la même manière juste après : «  L’Eternel lui parla : Va parler à pharaon pour qu’il laisse aller les enfants d’Israël. Moïse répondit : Les enfants d’Israël ne m’ont pas écouté ; comment le pharaon m’écouterait-il, moi qui n’ai pas la parole facile… »

 

Les échecs passés appellent la peur, l’incrédulité et… la défaite alors.

Et pourtant cette spirale de l’échec peut s’arrêter ! Que s’est-il passé pour que Marie de Magdala se retourne et regarde enfin celui qui lui parlait ?

2) Jésus l’a appelé par son nom « Marie… »  :

 

. « Marie ! » : c’est ce nom (et certainement la manière de le prononcer) qui a permis à cette femme de sortir de son monde sans espoir, d’être guérie de ses échecs, de combler ses attentes.

La voix de Jésus, ses paroles qui déjà quelques phrases plus tôt l’interpelaient, n’avaient pas déclenché cette reconnaissance de lui-même. C’est l’évocation de son nom qui l’a métamorphosée.

Jésus n’a pas prononcé son nom pour l’appeler, comme il l’avait fait pour ses disciples : « Matthieu, suis-moi » ; ni pour lui demander quelque chose.

Il y avait derrière l’évocation de son nom la reconnaissance de son identité et l’assurance d’une relation personnelle, d’une communion personnelle. Et c’est cela qui a transformé Marie.

 

. D’autres hommes dans la Bible, dans des circonstances différentes, ont été ainsi nommés par Dieu, et cela les a transformés.

Abraham répond à l’ordre de l’Eternel d’offrir son fils en sacrifice ; il est certain de la demande de Dieu, bien qu’absolument contraire à ce qu’il connaissait de Dieu ; il est anéanti par ce geste atroce qu’il va accomplir.

Dans cette tension extrême, Dieu alors intervient, au dernier moment : « Abraham ! Abraham ! Parce que tu as fait cela et que tu n’as pas refusé ton fils, ton unique, je te bénirai » (Ge 22) : la double évocation de son nom signifie plus qu’un stop ! C’est une reconnaissance de la personne même d’Abraham ; Dieu par le geste même d’Abraham affirme le connaître jusqu’au plus profond. Et il intervient pour lui.

 

Moïse se sent bien seul dans le désert avec le troupeau de son beau-père, avec le fardeau de son passé qui le poursuit (le meurtre d’un égyptien) ; il voit un buisson duquel sort du feu sans que, pourtant, il ne se consume, et une voix se fait entendre : « Moïse ! » (Ex 6).

C’est bien un appel personnel qui prouve que Dieu s’intéresse à lui ! En plein désert, en plein désarroi, Dieu le connaît et a un plan pour lui.

 

« Zachée ! » Jésus fait l’honneur d’appeler par son nom ce profiteur, ce voleur, ce collabo…

On l’appelait certainement plus « le minus » ou « le voleur », mais Jésus veut témoigner de l’intérêt à sa personne et non à ce qu’il a fait ou à sa fonction (Lc 19).

 

. Le peuple d’Israël est en plein désarroi, attendant l’intervention de Dieu (nous sommes en 700 av JC) ; et par le prophète Esaïe, Dieu lui dit : « Je t’appelle par ton nom » (Es 43). Cela va de pair, 2 versets plus loin, avec l’affirmation que Dieu le considère « comme précieux à ses yeux, qu’il l’honore et qu’il l’aime ». Le nom est le contraire du numéro impersonnel, sans véritable reconnaissance.

 

Du reste, dans la parabole du berger qui conduit son troupeau, Jésus souligne le fait qu’« il appelle par leur nom les brebis qui lui appartiennent » (Jn 10).

Nous, nous imaginons le décompte : « 90, 91, 92… » ; aujourd’hui, les correspondances par mail ont de moins en moins le nom dans l’en-tête… Pas le temps de s’adresser à une personne précise : le but est l’action, l’information, pas tant la personne.

 

La conséquence de cette connaissance personnelle, c’est la paix : « Ne crains rien » (Es 43v1), l’assurance de sa présence : « Je serai avec toi » (v2), sa protection dans les épreuves (et non leur suppression ; v2), le salut : « Je suis l’Eternel, ton Dieu, ton Sauveur » (v3).

Il n’est pas tant le Sauveur d’un monde dépersonnalisé mais bien plutôt le Sauveur qui me connaît intimement et qui veut avoir une relation personnelle avec moi, avec chacun.

 

. Pour Marie de Magdala, l’évocation de son nom l’a touchée au plus profond d’elle-même. Et elle revit, elle ressuscite ! Au lieu de vivre prostrée sur le passé, elle reprend cet espoir qui ne vient pas d’elle mais qui découle d’une relation retrouvée avec celui qui l’a libérée. Elle relève la tête. Elle se sait reconnue par son Seigneur : son amour est toujours vivant pour elle, sa présence est spirituelle et non plus physique avant tout.

 

Nous trouvons cette foi-là peut-être trop affective, et trop peu raisonnable ; ce qui nous toucherait plus, ce serait une foi à la Thomas, une foi logique, presque mathématique, avec des réponses précises aux problèmes précis.

Le fils aîné de la parabole de Jésus (Lc 15) réagit de cette manière logique, rigoureuse : « Moi, j’ai fait tant de choses pour toi, sans rien en retour ! Et ton autre fils a tout gaspillé, et tu l’accueilles à bras ouverts ! Explique-toi ! » La réponse du Père ? « Mon enfant… ».

 

Le Seigneur veut nous toucher par son amour et pas avant tout par sa puissance ; il s’approche de nous avec tendresse en voulant vivre avec nous dans une communion personnelle. Par son amour il nous ressuscite et nous fait vivre.

 

Jean-Ruben

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